Aides à l’industrie : la France et l’Allemagne veulent contrer les Etats-Unis
Paris et Berlin défendent une contre-offensive commune à l’Inflation Reduction Act qui subventionne l’industrie américaine. Les deux pays demandent à la Commission européenne un assouplissement des règles pour les aides d’Etat aux entreprises, des « subventions ciblées et des crédits d’impôt » pour les secteurs stratégiques.
Face à Washington qui veut subventionner massivement l’industrie américaine , Paris et Berlin concrétisent ce lundi leur contre-offensive commune. Bruno Le Maire et son homologue Robert Habeck viennent de transmettre une « contribution franco-allemande » à la Commission européenne. Les deux pays, qui représentent ensemble plus de 40 % du PIB de l’UE, invitent l’exécutif européen à « prendre en compte » leurs propositions dans les mesures qu’il doit proposer dès janvier en réponse au protectionnisme croissant des Etats-Unis.
« Nous devons mener des efforts européens pour sécuriser la base industrielle de l’Europe, en particulier les industries vertes critiques », déclarent les deux ministres de l’Economie dans ce document qui signe la détermination des deux pays à affronter les défis à venir main dans la main.
« Soutenir nos industries émergentes »
La France et l’Allemagne commencent par réitérer un espoir, celui que Joe Biden accepte d’assouplir la législation votée l’été dernier dans le cadre de l’Inflation Reduction Act . Bruno Le Maire et Robert Habeck se rendront aux Etats-Unis le mois prochain pour en parler de nouveau avec les Américains. Ils demandent « des exceptions » aux mesures protectionnistes américaines pour les Vingt-Sept. Les produits fabriqués en Europe devraient être « éligibles aux crédits d’impôt » accordés par Washington « de la même façon que les produits américains ». L’Allemagne veut à tout prix éviter « une guerre commerciale » avec les Etats-Unis, explique-t-on dans l’entourage du ministre allemand.
En réalité, la négociation entre l’UE et Washington s’annonce hasardeuse, et les ministres le savent bien… C’est pourquoi la France et l’Allemagne poussent pour une « une nouvelle politique industrielle verte européenne » accordant une large place à l’intervention de la puissance publique.
Le Maire et Habeck veulent « conserver une solide base industrielle avec des emplois bien rémunérés », construire « des capacités de production suffisantes » pour la transition énergétique, notamment pour les matières premières, « soutenir et nourrir nos industries émergentes lorsqu’elles sont confrontées à des pratiques » qui faussent la concurrence « au niveau international ».
Subventions et crédits d’impôt
Concrètement, Paris et Berlin sont d’accord pour un assouplissement des règles européennes qui régissent les subventions publiques aux entreprises. Un changement de doctrine de taille outre-Rhin, où le respect des conditions équitables de concurrence prévalait jusque-là. « Les règles existantes sur les aides d’Etat pourraient être plus souples dans le domaine des technologies de transformation, demandent les ministres. Nous avons besoin de processus de prise de décision plus simples, plus rapides et plus prévisibles. »
Des « mesures équivalentes » à ce qui est pratiqué à l’international doivent être autorisées pour les industries stratégiques comme l’éolien, les pompes à chaleur, l’hydrogène ou le photovoltaïque, autant de secteurs aidés massivement par l’Inflation Reduction Act. Le document suggère « d’expérimenter des subventions ciblées et des crédits d’impôt » pour des secteurs industriels clés.
Pas d’emprunt européen
La France et l’Allemagne demandent un élargissement du champ des « projets importants d’intérêt européen commun » (PIIEC), au-delà des technologies innovantes qui sont les seules concernées aujourd’hui ( hydrogène , microélectronique, batteries, cloud…), sachant que les PIIEC bénéficient d’un cadre plus souple en matière d’aides d’Etat. Et le temps nécessaire pour que les PIIEC soient approuvés « devrait être divisé par deux ».
Le document reste toutefois en retrait sur la question du financement de cette politique industrielle offensive, se contentant d’évoquer « comme première étape » une « réorientation » des fonds européens non utilisés comme ceux du plan de relance post-Covid, ainsi qu’une « évaluation » du rôle des institutions financières comme la Banque européenne d’investissement .
Paris se heurte en effet toujours au rejet de l’idée d’un fonds souverain, que l’Allemagne voit comme un pied dans la porte pour de nouvelles dettes communes. Or la coalition allemande dans son entier est hostile à toute idée d’emprunt européen supplémentaire poussée par Paris. « Il y a encore beaucoup d’argent à disposition qui n’a pas été utilisé, la question est plutôt de savoir comment on le mobilise », explique-t-on dans l’entourage de Robert Habeck.
Critères qualitatifs pour les appels d’offres
L’autre limite de la convergence franco-allemande concerne la méthode : Berlin ne veut pas montrer les dents trop vite face à Washington en agitant la menace des instruments de défense commerciaux européens. Mais le nouvel agenda poussé par l’Allemagne en faveur d’un accord de libre-échange entre l’UE et les Etats-Unis n’a, à l’inverse, pas les faveurs de Paris.
Outre la réponse européenne, la France et l’Allemagne promettent dans ce document de prendre des mesures au niveau national. Pour les appels d’offres publics, les deux pays comptent en particulier « explorer l’inclusion de critères qualitatifs ». Dans l’entourage de Bruno Le Maire, on évoque l’idée de favoriser « les produits qui respectent les objectifs de l’accord de Paris sur le climat.
« Nous invitons tous les Etats membres à prendre des mesures similaires », conclut le document. La balle est maintenant dans le camp de la Commission et des 25 autres pays de l’Union.
Publié à l’origine par: https://www.lesechos.fr/monde/europe/aides-a-lindustrie-la-france-et-lallemagne-veulent-contrer-les-etats-unis-1890597
Ayudas a la industria: Francia y Alemania quieren contrarrestar a Estados Unidos
París y Berlín defienden una contraofensiva conjunta a la Ley de Reducción de la Inflación, que subvenciona la industria estadounidense. Los dos países piden a la Comisión Europea que flexibilice las normas sobre ayudas estatales a empresas, «subvenciones específicas y créditos fiscales» para sectores estratégicos.
Frente a Washington, que quiere subvencionar masivamente la industria estadounidense, París y Berlín concretaron el lunes su contraofensiva conjunta. Bruno Le Maire y su homólogo Robert Habeck acaban de enviar una «contribución franco-alemana» a la Comisión Europea. Los dos países, que juntos representan más del 40% del PIB de la UE, invitan al Ejecutivo europeo a «tener en cuenta» sus propuestas en las medidas que debe proponer en enero en respuesta al creciente proteccionismo estadounidense.
«Debemos liderar los esfuerzos europeos para asegurar la base industrial de Europa, en particular las industrias ecológicas críticas», afirman los dos ministros de Economía en el documento, que señala la determinación de los dos países de afrontar mano a mano los retos que se avecinan.
«Apoyar nuestras industrias emergentes»
Francia y Alemania empiezan reiterando su esperanza de que Joe Biden acepte flexibilizar la legislación aprobada el verano pasado como parte de la Ley de Reducción de la Inflación. Bruno Le Maire y Robert Habeck viajarán a Estados Unidos el mes que viene para volver a tratar el tema con los norteamericanos. Piden «excepciones» a las medidas proteccionistas de EE.UU. para los Veintisiete. Los productos fabricados en Europa deberían «poder optar a los créditos fiscales» que concede Washington «del mismo modo que los productos estadounidenses». Alemania quiere evitar a toda costa «una guerra comercial» con Estados Unidos, según el entorno del ministro alemán.
En realidad, la negociación entre la UE y Washington va a ser arriesgada, y los ministros son muy conscientes de ello… Por eso Francia y Alemania impulsan una «nueva política industrial verde europea» con un gran papel para la intervención pública.
Le Maire y Habeck quieren «mantener una base industrial sólida con empleos bien remunerados», construir «una capacidad de producción suficiente» para la transición energética, sobre todo de materias primas, y «apoyar y nutrir a nuestras industrias emergentes cuando se enfrentan a prácticas» que distorsionan la competencia «a nivel internacional».
Ayudas y créditos fiscales
En concreto, París y Berlín han acordado flexibilizar las normas europeas que regulan las subvenciones públicas a las empresas. Se trata de un importante cambio de doctrina en Alemania, donde hasta ahora prevalecía el respeto de las condiciones de competencia leal. Las normas vigentes sobre ayudas estatales podrían flexibilizarse en el ámbito de las tecnologías de transformación», exigieron los ministros. Necesitamos procesos de toma de decisiones más sencillos, rápidos y predecibles.
Deben permitirse medidas equivalentes a las utilizadas internacionalmente para industrias estratégicas como la eólica, las bombas de calor, el hidrógeno y la fotovoltaica, todas ellas muy apoyadas por la Ley de Reducción de la Inflación. El documento sugiere «experimentar con subvenciones específicas y créditos fiscales» para sectores industriales clave.
Pas d’emprunt européen
Francia y Alemania piden que se amplíe el ámbito de aplicación de los «proyectos importantes de interés común europeo» (PIIEC) más allá de las tecnologías innovadoras que son las únicas afectadas hoy en día (hidrógeno, microelectrónica, baterías, nube, etc.), teniendo en cuenta que los PIIEC se benefician de un marco más flexible en materia de ayudas estatales. Y el tiempo necesario para la aprobación de la PIIEC «debería reducirse a la mitad».
Sin embargo, el documento no aborda la cuestión de la financiación de esta ofensiva política industrial, limitándose a mencionar «como primer paso» una «reorientación» de los fondos europeos no utilizados, como los del plan de recuperación post-Covid, así como una «evaluación» del papel de instituciones financieras como el Banco Europeo de Inversiones.
París sigue luchando contra el rechazo a la idea de un fondo soberano, que Alemania ve como un pie en la puerta de nuevas deudas comunes. Sin embargo, toda la coalición alemana es hostil a cualquier idea de endeudamiento europeo adicional impulsada por París. «Todavía hay mucho dinero disponible que no se ha utilizado, la cuestión es más bien cómo movilizarlo», explicó el entorno de Robert Habeck.
Criterios cualitativos para las ofertas
El otro límite de la convergencia franco-alemana se refiere al método: Berlín no quiere enseñar los dientes demasiado rápido a Washington agitando la amenaza de los instrumentos europeos de defensa comercial. Pero la nueva agenda impulsada por Alemania en favor de un acuerdo de libre comercio entre la UE y Estados Unidos no cuenta con el favor de París.
Además de la respuesta europea, Francia y Alemania prometen en este documento tomar medidas a nivel nacional. Para las licitaciones públicas, los dos países se proponen, en particular, «explorar la inclusión de criterios cualitativos». En el entorno de Bruno Le Maire se menciona la idea de favorecer «los productos que respeten los objetivos del acuerdo de París sobre el clima».
«Invitamos a todos los Estados miembros a adoptar medidas similares», concluye el documento. La pelota está ahora en el tejado de la Comisión y los otros 25 países de la UE.
Publicado originalmente por: https://www.lesechos.fr/monde/europe/aides-a-lindustrie-la-france-et-lallemagne-veulent-contrer-les-etats-unis-1890597